dimanche 26 novembre 2017

LE CHRIST ROI DE L'UNIVERS / ANNÉE A


26/11/17

Matthieu 25, 31-46

La solennité du Christ roi de l’univers, instituée en 1925 par le pape Pie XI, marque la fin de notre année liturgique. La première lecture, le psaume et l’Evangile illustrent la royauté du Christ avec l’image biblique du berger ou du bon pasteur et celle, correspondante, des brebis. Cette association entre l’humble métier de berger et la royauté a de quoi nous surprendre, même si David, ancêtre du Christ, fut berger avant d’être consacré roi. Par ailleurs les bergers furent les premiers à venir honorer le nouveau-né de la crèche. A la fin de l’année chrétienne, la figure du roi-berger est aussi celle du juge : je vais juger entre brebis et brebis, entre les béliers et les boucs. Le Fils de l’homme décrit dans l’Evangile séparera les hommes les uns des autres, comme le berger sépare les brebis des chèvres. L’une des facettes de la royauté du Christ réside donc dans sa fonction de juge. Le Christ Roi incarne la justice même de Dieu. L’Evangile nous donne le critère qui permettra l’exercice de cette justice : l’amour de charité envers notre prochain, en particulier envers les plus pauvres et les plus démunis. Tous ceux qui à travers leur vie auront contribué à soulager la souffrance d’autrui n’auront rien à craindre du jugement, car l’amour parfait bannit la crainte. Les grandes prophéties messianiques d’Isaïe insistent sur la justice divine du Messie à venir :

Il ne jugera pas sur l’apparence ; il ne se prononcera pas sur des rumeurs. Il jugera les petits avec justice ; avec droiture, il se prononcera en faveur des humbles du pays. Du bâton de sa parole, il frappera le pays ; du souffle de ses lèvres, il fera mourir le méchant. 
La justice est la ceinture de ses hanches ; la fidélité est la ceinture de ses reins.

Bien plus tard le livre de la Sagesse développera cette figure du juge divin impartial qui demandera des comptes à ceux qui détiennent le pouvoir politique :

Écoutez donc, ô rois, et comprenez ; instruisez-vous, juges de toute la terre. Soyez attentifs, vous qui dominez les foules, qui vous vantez de la multitude de vos peuples. Car la domination vous a été donnée par le Seigneur, et le pouvoir, par le Très-Haut, lui qui examinera votre conduite et scrutera vos intentions.  En effet, vous êtes les ministres de sa royauté ; si donc vous n’avez pas rendu la justice avec droiture, ni observé la Loi, ni vécu selon les intentions de Dieu, il fondra sur vous, terrifiant et rapide, car un jugement implacable s’exerce sur les grands ; au petit, par pitié, on pardonne, mais les puissants seront jugés avec puissance. Le Maître de l’univers ne reculera devant personne, la grandeur ne lui en impose pas ; car les petits comme les grands, c’est lui qui les a faits : il prend soin de tous pareillement. Les puissants seront soumis à une enquête rigoureuse.

Une autre facette de la figure du Christ Roi est celle de la vie éternelle. Aux justes, il s’adresse ainsi : recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la création du monde. Tout a été créé dans et par le Fils. Sa royauté consiste donc à sauver toute la création après avoir détruit toutes les puissances du mal. Saint Paul nous fait entrevoir d’une manière grandiose le triomphe du prince de la vie sur toute forme de mort à la fin des temps :

Car c’est lui qui doit régner jusqu’au jour où Dieu aura mis sous ses pieds tous ses ennemis. Et le dernier ennemi qui sera anéanti, c’est la mort, car il a tout mis sous ses pieds. Et, quand tout sera mis sous le pouvoir du Fils, lui-même se mettra alors sous le pouvoir du Père qui lui aura tout soumis, et ainsi, Dieu sera tout en tous.

Le Christ roi, juge et serviteur de la vie, règne donc par la seule puissance de son amour divin afin que Dieu soit tout en tous. Cette magnifique formule de Paul nous montre le but de la royauté de Jésus : l’élimination totale du mal en nous et dans la création en vue de la parfaite réconciliation et communion. Le Royaume des Cieux ou le Paradis, c’est bien cela : Dieu qui sera tout en tous.


dimanche 19 novembre 2017

33ème dimanche du temps ordinaire / A


Matthieu 25, 14-30

19/11/17

Argent, banque, intérêts… Les images employées par Jésus dans la parabole des talents sont trompeuses. Le sujet de l’enseignement qui nous est délivré en ce dimanche n’a rien à voir avec les affaires, l’économie ou encore la finance. Jésus n’est pas venu parmi nous pour nous donner des cours d’école de commerce ou encore pour nous inviter à nous enrichir en faisant de bonnes opérations financières. L’homme de la parabole qui part en voyage, confie à ses serviteurs ses biens puis revient, c’est Jésus comme le dit l’introduction de l’Evangile. A la fin de l’année liturgique, les Evangiles abordent le thème de la fin de notre monde tel que nous le connaissons et du retour du Christ en gloire. A ce moment-là, cela ne nous servira absolument à rien d’avoir prospéré dans les affaires ou encore d’être riches, comme le montre par ailleurs l’histoire de l’homme riche qui meurt subitement en saint Luc. La conclusion donnée par le Seigneur est très claire :

Dieu lui dit : “Tu es fou : cette nuit même, on va te redemander ta vie. Et ce que tu auras accumulé, qui l’aura ?” Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même, au lieu d’être riche en vue de Dieu.

Les talents dont nous parle Jésus, ce sont nos dons et nos aptitudes. La langue française a conservé cette signification métaphorique du mot talent qui désignait bien à l’origine de l’argent sous la forme de trente kilos de métal précieux. D’ailleurs le maître donne à chacun selon ses capacités. Jésus nous confie ses biens et nous donne des capacités humaines et spirituelles. Tout au long de notre vie, nous sommes appelés tout d’abord à reconnaître ces dons, à les identifier, à en prendre conscience, puis ensuite à les faire fructifier, à les utiliser pour accomplir la volonté de Dieu. Car, nous dit la parabole, on nous demandera des comptes sur notre manière d’utiliser les dons du Seigneur. C’est le moment du bilan qui correspondra probablement pour nous au moment de notre propre mort. Et l’Evangile nous enseigne aussi qu’au plus nous avons reçu, au plus il nous sera demandé. Ceux qui ont reçu plus de dons en raison de leurs capacités ont donc le devoir de donner des fruits plus nombreux. Celui qui a reçu cinq talents en a gagné cinq autres, celui qui a reçu deux talents en a gagné deux autres.

Cherchons maintenant à comprendre pourquoi le troisième serviteur, mauvais et paresseux, n’a pas réussi sa vie aux yeux de son maître. Ce n’est pas parce qu’il n’a reçu qu’un talent, en fonction de ses capacités moindres par rapport aux deux premiers serviteurs. La première raison de son échec consiste en l’image faussée qu’il s’était fait de son maître : un homme dur. D’où l’importance pour nous, chrétiens, d’avoir une image vraie de notre Dieu, celle-là même que Jésus nous révèle en sa propre personne : un Dieu d’amour qui se donne et donne sans compter, un Dieu miséricordieux qui prend plaisir à nous pardonner et à nous relever chaque fois que nous tombons et que nous revenons à lui. Personne n’a en effet envie de travailler et de faire des efforts pour un maître au cœur dur et sévère, mais il en est tout autrement si ce maître est Jésus, doux et humble de cœur ! La seconde raison de l’échec de ce serviteur, nous la trouvons dans sa peur. Or, il est bien connu de tous que la peur paralyse et nous empêche d’entreprendre et d’aller de l’avant. Combien de fois dans la Bible le message de Dieu consiste à s’adresser à chacun de nous en lui disant : Confiance, n’aie pas peur !


Au soir de notre vie, puissions-nous avoir cette grâce de faire le bilan avec Jésus et de constater que grâce à lui notre passage sur cette terre aura donné beaucoup de beaux fruits ! N’attendons pas ce moment pour utiliser les dons du Seigneur et répandre autour de nous plus de joie, de confiance, de paix, d’amour et de solidarité ! Puissions-nous, à notre humble mesure, contribuer par ces fruits à l’édification du Royaume de Dieu !

dimanche 5 novembre 2017

TOUSSAINT 2017


Le concile Vatican II a enseigné, en conformité avec le message du Nouveau Testament, que tous les fidèles du Christ étaient appelés à la sainteté. C’est donc la vocation commune à tous les chrétiens en raison de la grâce reçue au baptême et à la confirmation. Cette grande vérité avait été quelque peu oubliée dans le passé, si bien qu’on en venait à penser que la sainteté était réservée aux vocations particulières : religieux, religieuses et membres du clergé. Saint François de Sales s’est élevé avec force contre cette réduction de l’appel à la sainteté à certaines vocations, et cela au 17ème siècle. En témoigne ce passage de son Introduction à la vie dévote :

C'est une erreur de vouloir bannir la vie dévote de la compagnie des soldats, de la boutique des artisans, de la cour des princes, du ménage des gens mariés. Il est vrai que la dévotion purement contemplative, monastique et religieuse ne peut être exercée en ces vocations-là mais aussi, outre ces trois sortes de dévotion, il y en a plusieurs autres, propres à perfectionner ceux qui vivent ès états séculiers. Où que nous soyons, nous pouvons et devons aspirer à la vie parfaite.

La solennité de la Toussaint est une occasion de nous rappeler cet appel universel à la sainteté, appel qui concerne tout autant les membres laïcs de l’Eglise que le clergé et les personnes consacrées dans la vie religieuse. Simplement chaque chrétien peut aspirer à la sainteté en fonction de sa vocation, ce qui signifie que les chemins et les moyens ne sont pas les mêmes pour tous. Saint François de Sales le montre clairement :

Dieu commanda en la création aux plantes de porter leurs fruits, chacune selon son genre : ainsi commande-t-il aux chrétiens, qui sont les plantes vivantes de son Église, qu'ils produisent des fruits de dévotion, un chacun selon sa qualité et vocation. La dévotion doit être différemment exercée par le gentilhomme, par l'artisan, par le valet, par le prince, par la veuve, par la fille, par la mariée ; et non seulement cela, mais il faut accommoder la pratique de la dévotion aux forces, aux affaires et aux devoirs de chaque particulier.

Le concile Vatican II enseigne que le lieu propre de l’exercice de la sainteté par les fidèles laïcs, c’est notre monde. Les personnes laïques, mariées ou célibataires, se sanctifient dans l’accomplissement de leurs tâches au sein même des réalités terrestres. D’où l’importance de toujours rechercher l’accomplissement de son devoir d’état dans la famille, le travail comme dans la société. Les laïcs se sanctifient tout particulièrement dans les domaines étudiés par la doctrine sociale de l’Eglise : la famille, le travail et l’économie, la politique, l’écologie et la promotion de la paix. C’est par leur engagement de foi dans ces réalités, si importantes pour la vie de la société, que les fidèles laïcs sont sel de la terre et lumière du monde. Cela ne signifie pas, bien sûr, que les laïcs pourraient se désintéresser de la spiritualité et de la vie de prière, bien au contraire. Simplement une maman ou un papa ne peuvent pas s’adonner à la prière de la même manière qu’une personne consacrée dans un monastère. Et saint François de Sales va encore plus loin en affirmant que notre recherche de la sainteté doit aussi tenir compte de notre situation personnelle concrète : il faut accommoder la pratique de la dévotion aux forces, aux affaires et aux devoirs de chaque particulier. Cela signifie que telle mère ou père de famille pourra prier chaque jour 30 minutes alors que pour d’autres 10 minutes suffiront… Donc pas de règles rigides et uniformes qui seraient valables pour tous dans la recherche de la vie parfaite ! Même si un minimum est exigé comme la participation à la messe du dimanche, la prière quotidienne et la confession pascale ainsi que la volonté de mettre en pratique le commandement de l’amour. La première lecture nous montre une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations, races, peuples et langues. La sainteté n’est donc pas réservée à un petit nombre d’élus. Telle est notre espérance, devenir semblables à Jésus parce que nous le verrons tel qu’il est. Tout homme qui fonde sur lui une telle espérance se rend pur comme lui-même est pur. La sainteté est en effet d’abord un chemin, toujours à reprendre sans jamais se décourager. Elle est le chemin du désir de Dieu, du désir de ressembler au Christ des Béatitudes. Elle est le chemin de la communion avec Dieu par la pratique du commandement de l’amour. Nous faisons dès maintenant partie du peuple des saints et des saintes si nous nous reconnaissons dans les paroles du psaume :

Voici le peuple de ceux qui cherchent le Seigneur, qui recherchent la face de Dieu !

Les saints et les saintes du Ciel ont tous été des chercheurs de Dieu en pratiquant jour après jour, dans la joie comme dans les épreuves, les vertus de foi, espérance et charité.